Enfin l’heure d’embarquer, à bord,  une tripotée de français représente la grande majorité des passagers même si ça brasse les nationalités, deux autres cyclistes, brésiliens, naviguent la même route.

Premier contact et fraternisation instantanée avec Eva qui a pédalée un bout de la route australe avant de craquer et vendre sa monture, comme le lui réclamé son corps et son esprit, mal accompagnée et usée physiquement par les routes cahoteuses en tôle ondulée. 

C’est effectivement difficile de voyager avec les bonnes personnes, sur la route les masques tombent très vite.

Nous papotons une bonne partie du voyage, aussi avec Isabelle la pédiatre sympa aux jumelles Zeiss et son mari Félix d’origine Chilienne, Aude le mère de famille voyageant seule et ne laissant rien au hasard, Javier l’espagnol, guide touristique à Menorca et les deux brésiliens Rosangela et Edson, voyageant ensemble depuis un mois, qui me permettent de retrouver quelques saveurs et vibrations laissées derrière moi il y a quelques mois déjà.

Les fjords sont d’une toute beauté, plus minérales qu’au nord, le temps est plus clément, les animaux aquatiques et volatiles plus présent, albatros, phoques, pingouins, une baleine au loin, mère nature est au rendez-vous, l’eau noire donne au paysage une atmosphère de fin du monde ou début du monde selon le point de vue. 

Les lieux mythiques des marins et de l’histoire s’enchaînent, de la sortie du détroit de Magellan jusqu’à la région du cap Horn en passant par le canal Beagle, les glaciers de la cordillère Darwin, bleutés, impressionnants, imposants mais atrophiés par le réchauffement climatique, incrustés ou suspendus dans la roche grise et minérale, distillant leurs eaux douces à l’océan Pacifique.

A certains endroits dans les eaux plus calmes du canal, le paysage se duplique en effet de miroir.

Et puis arrive l’heure d’accoster à Puerto Williams, il est 2h du matin, les trois cyclistes se sont regroupés et cherchent un endroit pour camper, une place repérée sur le plan en bordure de ville ne convient pas, nous continuons un peu plus loin pour s’enfiler dans un chemin de terre nous amenant sur les hauteurs. Après quelques prospections on installe nos tentes sur le seul endroit dégagé visible en pleine nuit, humide mais plus ou moins plat. Bonne nuit !💤