Encore une nuit froide et humide, il a fallu un moment pour monter en chaleur mais heureusement, emmitouflé dans mon duvet en plume d'oie, tout est plus facile, après un certain temps j'ai même pu enlever la capuche. Pour Silvina c'est un peu plus compliqué, lorsque je sors de la tente je la recouvre avec mon sac de couchage afin qu'une onde de chaleur irradie et la réchauffe. Pendant ce temps je m'en vais creuser mon puit quotidien puis m'occupe de la tente qui dégouline d'humidité comme tous les matins ces derniers jours. Opération séchage.

Rangement des affaires de couchage puis petit déjeuner pendant que les toiles de tente continuent de sécher, accrochées à un tronc charrié par la rivière ou poser sur un gros rocher, le plus loin possible du sable qui détruit les fermetures éclaires de la guitoune.

Tout est rangé, c'est parti pour une journée d'ascension!

Dès le début, impossible de pédaler, c'est humide, avec une belle inclinaison, l'herbe est haute et après quelques centaines de mètres déjà nous voyons venir à nous l'escarpement de la pente qui nous oblige à nous mettre à deux pour hisser nos montures et avoir accès à un bout de prairie.

Une zone plus propice à pédaler à condition de rester hors du sentier de vaches qui patine à l'extrême, séance slalom entre les arbustes et la graminée afin de faire tourner nos plateaux et pignons de la liberté, le cul posé sur la selle.

Tout se mesure en centaines de mètre puisque très vite il faut à nouveau redescendre de nos biclous, traverser un ruisseau qu'une source amène depuis le haut de la montagne. C'est rocailleux à souhait, bourbeux et profond, il faut donc enlever les souliers pour traverser dans l'eau gelée, poser la monture, rincer les petons pleins de boue, les sécher puis renfiler nos chaussures avant de s'attaquer au raidillon abrupte qui se trouve juste après..

N'oublions pas que nous nous trouvons dans une forêt de nuage, un climat humide qui rend le terrain particulièrement difficile, boueux, glissant voir marécageux.

C'est le cas de ce versant, où seuls quelques groupes de bovins paissent la prairie bordant la rivière, en lisière de la forêt. Les bêtes sont toutes surprises de voir apparaître deux limés de la cafetière poussant des vélos chargés, traversant leur havre de paix, en suivant un petit sentier et pataugeant dans la gadoue.

Le temps est couvert , plutôt gris, malgré tout on garde le sourire.

Encore une petite zone de pâturage, un peu en descente, alors on se laisse glisser pour une courte avancée sans effort, de suite on se retrouve une nouvelle fois au milieu des vaches mais cette fois le sentier principal à disparu, après vérification sur le gps c'est confirmé, nous nous sommes éloignés de la trace principale, elle est située une centaine de mètres plus haut, alors on pousse dans la prairie ascendante jusqu'à retrouver la voie à suivre.

Après le premier kilomètre et 45 minutes d'efforts en forme de prélude, nous entamons les choses sérieuses avec des pentes oscillantes autour de 10%. Autant dire que dans de telles conditions, impossible de pédaler, d'autant plus avec des pneus sans crampon, alors on pousse, on soulève, on s'enfonce... Oh hisse!

Le deuxième kilomètre nous coûte encore une bonne heure intense de pousse pousse.

La fringale guète, c'est le moment de faire le plein d'énergie avant de continuer l'ascension. Au menu, salade de nouille, agrémentée de cacahuètes, mandarines et un bout de chocolat noir pour se donner du courage.

En repartant le parcours est encore plus exigeant, le sol est de plus en plus détrempé, l'inclination de plus en plus forte, Emilio nous avait prévenu qu'une partie du sentier serait un véritable marécage, et bien on est désormais en plein dedans, nos chaussures sont recouvertes de boue, les appuis sont limités et avec le poids de ma monture c'est pire, faire avancer le vélo devient de plus en plus difficile.

Entre le boue, l'inclianaison et la rocaille, impossible de pédaler le moindre mètre, tout le trajet s'effectue en poussant nos monture, plus c'est dur et moins je supporte mon biclou, définitivement trop lourd et plus du tout adapter à mes expéditions.

Il est grand temps de changer, je lance donc un appel à l'aide:

"chères lectrices, chers lecteurs, si vous êtes chaud à me donner un coup de pouce pour pouvoir acquérir un vélo plus en adéquation avec mes aventures, tout soutien, toute contribution seront la bienvenue. Vous pouvez me contacter en message privé pour mes données bancaire ou me payer un café, via instagram et l'application "buy me a coffee". Toute aide aussi minime que soit sera un geste important à mes yeux pour que suivent mes romans d'aventures".

Cette parenthèse étant fermée , heureusement que le paysage de cette jungle de nuage en vaut la chandelle, parfois un brin de soleil et puis quelques minutes plus tard de nouveau dans le brouillard , le temps est extrêmement changeant mais la palette de vert, les couvertures de mousses et de lichens nous laissent pantois.

On continue l'ascension dans traverses bien exigeantes et évidemment le sol est gorgé d'eau.

Comme chantait si joliment Serge Gainsbourg:


"faudrait des bottes de caoutchouc

pour patauger dans la gadoue,

la gadoue, la gadoue, la gadoue

hou la gadoue, la gadoue

une à une les gouttes d'eau

me dégoulinent dans le dos

nous pataugeons dans la gadoue....."


En arrivant au sommet de ce versant, vers 1500m d'altitude, nous avons parcouru un peu moins de cinq kilomètres, à peine, en un peu plus de quatre heures de temps. Le climat se dégage enfin, le ciel montre des teintes bleu, certains sommets alentours baignent encore dans les nuages, la végétation ainsi que les tonalités du paysage deviennent plus contrastés. Un rocher invite à la pause afin de profiter du panorama, cette zone exposé au soleil est un peu moins humide que ce que nous venons de passer, heureusement.

Devant nous une portion de descente, peut-être propice au pédalage, nous désenchantons rapidement, le sentier est étroit, extrêmement rocailleux, des portions raides avec mes freins au bout de leur vie ça devient dangereux, mieux vaut pousser.

J'ai beau resserrer le réglage des freins, avec la boue et l'humidité, les freins à patins ça freinent que dalle, à fond sur les manettes, le vélo ne s'immobilise pas.

Encore une raison quine pousse à changer de monture et passer à des freins à disque plus adaptés à la montagne.

Chaque passage de ruisseau est une épreuve de force, lorsque je sens Silvina prête à craquer, après une chute notamment, je la fais passer le ruisseau ou la zone, à vide sans charge et m'occupe de sa monture.

Toujours, quelques équidés par ci ou bovins par là, bien sauvages, camouflés dans la végétation nous observent avec un air attentif et circonspect.

Une quinzaine de minutes auparavant le soleil réchauffait nos coeur, mais de nouveau nous plongeons dans le brouillard, il nous reste moins de deux kilomètres à parcourir jusqu'à la rivière. Nos poignets et nos coudes ont soufferts de tant d'efforts pour soulever nos biclous.

Enfin arrive une portion ascendante qui nous permet de pédaler, le sentier de vaches est forcément imbibé mais ça passe. Quel soulagement de ne plus pousser, ça reste exigeant mais c'est beaucoup moins énergivore d'avancer le cul sur la selle.

Avancée dans le brouillard, on y voit pas grand chose, mais déjà le chant du torrent se fait de plus en plus présent, on se rapproche.

La dernière partie en descente pour rejoindre le lit de la rivière ne me permet malheureusement pas de pédaler, sans de bons feins c'estt mission suicide, d'autant plus qu'en cas de grave pépin on serait dans une merde noire.

je finis donc cette descente de la même manière que débuta cette journée, à côté du vélo mais cette fois en le retenant dans la pente.

Il est 17h lorsque nous atteignons le bord de la rivière, après cinq heures et demi d'épreuves de force et de détermination nous avons parcouru 7,7 km. Il reste deux heures avant la tombée de la nuit, la berge opposé est escarpé, abrupte et rocailleuse, pour aujourd'hui s'en ait assez, dur commun accord on décide de s'arrête là.

Ainsi, nous avons tout le temps de choisir un joli spot de camping, de s'installer tranquille et de se préparer un bon feu avant la tombée de la nuit.

Après exploration de la zone, choix de l'emplacement, montage de la tente, à deux c'est plus facile, en quelques minutes c'est réglé.

Pendant que Silvina prépare le nid douillet , opération ramassage de bois et lancement d'un feu de camps qui permettra de cuisiner, nous réchauffer et sécher nos habits mouillés.

Le ciel s'ouvre , se ferme à nouveau, brouillard puis ciel étoilé, ça va, ça vient, ça change tout le temps mais à côté de l'ardent brasier tout est plus facile.

Lovés derrière un gros rocher nous sommes à l'abri des bourrasques alors on prend le temps de bien tout sécher avant de rejoindre nos quartiers pour la nuit. Demain une longue journée nous attend avec une grosse étape.