Ce matin en pliant la tente, Ricardo et son collègue, les deux policiers de gardes du poste attenant, viennent taper le bout de gras, offrir de l'eau chaude, donner l'accès au toilettes. Il repassent plus tard pour offrir mandarines, citrons et oranges, la saison des agrumes bat son plein. Le petit village de Capitán Cáceres est tranquille, nous avons passé la nuit, installé entre la chapelle et le poste de police.

Il est plus de 11h lorsque les roues mordent enfin le pavé, à la première courbe, adieu l'asphalte lisse et confortable, nous revoilà sur une route de terre et de gravier, programme du jour, ascension de 22km pour se positionner au commencement du sentier qui monte vers la " quebrada del Portugués". La première partie du chemin traverse les plantations d'agrumes et de canne à sucre. Les travailleurs qui nous saluent chaleureusement, sont déjà sur le pied de guerre pour commencer la journée de cueillette. À mesure que nous gagnons en altitude la forêt des Yungas devient de plus en plus luxuriante, verdoyante, le lichen envahit arbres, troncs et branches, mais aussi toute surface minérale, les lianes se mettent à pendre, se balançant des branches les plus hautes. C'est le moment de faire une pause au bord de la rivière et d'en profiter pour faire un brin de toilette avant le déjeuner.

Exubérante végétation montagneuse aux multiples tons de vert, on en prend plein les yeux, mais aussi plein les oreilles, du chuchotement d'une source au rugissement féroce de la rivière Real dont les eaux frappent avec forces les roches qui dorment dans son lit, jusqu'aux chants et gazouillis des différentes espèces de volatiles qui me sont inconnues, une symphonie organique et bucolique rythme notre avancée qui parfois prend des aires de porte d'entrée au jardin d'Éden.

De nombreuses sources d'eau potable ruissellent sur les parois qui bordent le chemin. Passage par Pueblo viejo, un village quasi abandonné où résidaient les travailleurs de la première centrale hydroélectrique de la province de Tucumán, de nombreuses bâtissent en ruines se mélangent à celles encore habitées. Finalement, après avoir passé le pont qui traversent la rivière que nous suivons en contrebas depuis quelques kilomètres c'est l'arrivée à la prise d'eau de "los Reales" où nous camperont cette nuit. Petite promenade pour découvrir la zone puis installation du campement et préparation du dîner avant de rejoindre nos quartiers de toiles et de moustiquaire.

4h du mat', les gouttent de pluie commencent a faire flop flop sur la toile de tente. Ça sent pas bon, va falloir rester en stand bye toute la journée. Quelques heures plus tard, au réveil, la toile extérieure de la tente ressemble à un ciel étoilé de gouttes de pluie d'où dégoulinent à intervalles réguliers des étoiles filantes qui ruissellent plus vite que les autres pour arroser la graminée autour de la guitoune. À midi la giboulée et le vent s'intensifie. Patience, patience, c'est pas aujourd'hui que va commencer l'ascension vers la "Quebrada del Portugués". Heureusement le tour de garde change et l'énergie aussi, Raul est beaucoup plus ouvert et sympathique que son collègue, il nous donne de l'eau chaude pour le mâté. Vers 19h arrive la nuit, mais aussi cesse finalement la pluie, j'en profite pour sortir un moment discuter avec Raul et me préparer une petite soupe.